Depuis que notre offre des jeux de société pour les enfants s’est considérablement étendue en 2014, vous êtes nombreux à nous demander chaque semaine des conseils afin de bien choisir le premier jeu de société de votre enfant. Comment trouver ce premier jeu idéal ? A quel âge un enfant est-il capable de jouer à ses premiers jeux ? Nous allons tenter de vous guider dans les lignes qui suivent.
A quel âge offrir un premier jeu de société ?
Nombre d’entre vous sont des amateurs ou carrément des passionnés de jeux. Il est donc tout naturel que vous ressentiez l’envie ou le besoin d’offrir autour de vous ou à vos enfants les premiers jeux qui les feront vibrer et qui vous permettront de partager un moment ensemble autour de votre passion. Nous voyons régulièrement de jeunes parents qui trépignent d’impatience à l’idée de vivre leurs premières parties en commun avec leurs petits et qui, parfois, souhaitent commencer très jeune !
Notre conseil aujourd’hui est justement de faire tout l’inverse ! Ne vous pressez pas, soyez patients. Si la plupart d’entre vous commencent à prendre des renseignements dès que leurs enfants ont 2 ans, nous avons parfois des demandes dès 18 mois ! Or, à ces âges-là, les petits ont encore de nombreuses formes de jeux à découvrir ou à continuer d’explorer qui sont indispensables dans leur développement. Tout ce qui touche au sensori-moteur est accompagné progressivement dès 18 mois par le jeu symbolique ou jeu d’imitation. Petit à petit, l’enfant commence à faire comme ses parents, à jouer à la dinette, à imiter. Il devient l’acteur des histoires qu’il se raconte et, à travers elles, comprend le monde qui l’entoure et construit son langage. Nous avons tendance à retirer de plus en plus tôt cette forme de jeux aux enfants, la considérant bien souvent comme peu productive (au contraire d’un puzzle par exemple ou d’un jeu de société), alors qu’il faut l’encourager absolument.
Alors oui, je sais, vous allez me dire qu’il/elle est très en avance. Et c’est probablement vrai, du moins dans certains domaines. Il est normal qu’un enfant d’aujourd’hui développe plus rapidement certaines compétences que ceux d’il y a 30 ans. Comprendre le principe d’arborescence par exemple, avec la somme d’écran auxquels les enfants sont confrontés de nos jours, est bien plus évident aujourd’hui que pour les enfants nés au début des années 1980. En revanche, il y a d’autres domaines ou les petits prendront davantage leur temps. Et c’est normal ! Sinon, je peux vous dire qu’en plus de 10 ans de boutique, je serai particulièrement serein pour l’avenir du monde devant le nombre impressionnant de génies dont on m’a parlé.
Donc, notre conseil est d’attendre que l’enfant arrive sur ses 3 ans pour l’initier à la pratique du jeu de société. Est-il capable d’y jouer avant ? Oui, bien sûr, dès 2 ans et demi. Cependant, ce n’est pas le cas de tous les enfants et cela leur demandera beaucoup plus d’efforts alors qu’il y a encore tant d’autres formes de jeux à explorer.
Comment se comporter en tant qu’adulte lors des premières parties ?
La particularité du jeu de société, c’est qu’il impose une règle. Pour que la situation de jeu existe, il faut non seulement suivre des consignes, mais il faut prendre en considération qu’il y a d’autres personnes impliquées dans la situation de jeu. Et ça, mine de rien, cela met du temps à arriver dans le développement cognitif du jeune enfant. Il va falloir qu’il comprenne qu’il faut renoncer à son plaisir personnel pour que la situation de jeu existe. Avant cela, dans toutes ses formes de jeu, l’enfant est libre de faire ce qu’il souhaite. Empiler ses cubes n’importe comment, jouer avec ce ballon ou ce hochet en faisant ce qui lui passe par la tête, raconter les histoires qu’il veut… Et en plus, il peut s’arrêter dès qu’il en a envie !
Avec le jeu de société, c’est l’apparition de contraintes qu’il va falloir accepter, comprendre et digérer. Ne soyez donc pas surpris si, dans les premiers temps, l’enfant veut arrêter la partie avant la fin. Ce n’est pas grave. Je sais, au début ça défrise un petit peu, mais je vous assure, on s’en remet très bien.
De même, il ne faut pas hésiter à faire des essais. Vous tentez de proposer ce premier jeu dès que l’enfant a 2 ans et demi et là, patatras c’est la catastrophe. Il ne comprend pas, fait n’importe quoi, se lève toutes les 20 secondes… Pas de panique, c’est juste que l’enfant n’est pas encore prêt. Et ils évoluent tellement vite à cet âge que peut-être dans quelques semaines cela se passera très bien. N’hésitez donc pas à attendre un mois avant de refaire une tentative. Mais ne forcez pas, le but n’est pas de mettre votre bout de chou en situation d’échec ! Et d’un coup, vous verrez qu’il sera prêt que la magie pourra opérer.
Ma petite allait avoir 3 ans lorsque je lui ai proposé sa première partie de jeu de société. Cette première expérience s’est déroulée sans aucun soucis, j’ai eu la chance qu’elle soit prête à découvrir cette nouvelle forme de jeu au moment où je la lui ai proposé. Mais je ne m’attendais pas en revanche à ce qu’elle ait suffisamment intégré et compris les règles au point d’essayer de tricher pour gagner dès cette première partie ! Or, ce petit moment sympa n’aurait pas eu lieu si je lui avais proposé trop tôt, car elle n’aurait pas compris tous les enjeux de la partie.
Comment bien choisir un premier jeu de société ?
Bon, c’est bien joli tous ces conseils, mais je choisis quel jeu à partir de 3 ans ? La première chose que vous pouvez faire c’est vous orienter vers des maisons d’édition dont c’est la spécialité. Haba ou Djeco sont véritablement les deux spécialistes en la matière. Que cela soit par la qualité du matériel proposé (on y reviendra) ou par le savoir-faire développé depuis des années, les jeux sont bien adaptés. D’autres éditeurs comme le Scorpion Masqué ou Gigamic proposent dans un deuxième temps d’excellents jeux pour venir étoffer l’offre, mais ils sont pour la plupart un poil trop exigeant pour une première approche.
Bien conscients des demandes croissantes des parents qui souhaitent proposer des jeux de société de plus en plus tôt, Haba et Djeco ont développé toute une collection dès 2 ans. Mais ne vous y trompez pas, comme on l’a vu, avant 2 ans et demi, voire 3 ans, c’est de toute manière peine perdue. Les jeux de ces collections sont pour la plupart encore tout à fait adaptés à 3 ans et présentent l’avantage d’être rapides, simples, accessibles et d’avoir souvent plusieurs niveaux de jeu pour le faire évoluer avec l’enfant. En dehors de ces collections « 2 ans », l’âge indiqué sur les boîtes est le plus souvent assez juste.
En tant qu’adulte, si un jeu trop facile a tendance à nous ennuyer, ce n’est pas forcément le cas pour un enfant. Un jeu simple d’accès ou juste à son niveau va lui permettre d’être en situation de réussite, de se sentir valorisé ! Et s’il y a bien un domaine où on peut se permettre de laisser les petits lâcher prise, c’est bien celui du jeu. Ils sont déjà stimulés dans tous les autres aspects de leur existence alors offrons leur un espace de respiration ludique.
Et s’il vous plaît, ne prenez pas des jeux adultes ou pour enfants beaucoup plus âgés que vous simplifieriez ensuite ! Non, à 4 ans il n’est pas en capacité de jouer à Terraforming Mars (je caricature à peine). Et si vous simplifiez les règles, eh bien ce n’est plus le même jeu, donc il n’y joue pas vraiment. Très souvent, vous aurez l’impression que votre enfant comprend alors qu’il ne sera que dans l’imitation de vos gestes. Et plutôt que de simplifier un jeu, pourquoi ne pas prendre tout de suite un jeu adapté à ses compétences ?
Un autre constat : à cet âge là, il faut s’enlever de la tête que l’enfant continuera à prendre du plaisir avec la boîte jusqu’à ses 6 ou 8 ans. Cela pourra arriver, dans un bref moment de régression évidemment (qui fait parfois du bien !), mais c’est tout. Cela sous-entend également qu’il n’y a pas de solution miracle. Vous ne trouverez pas un premier jeu de société qui plaira autant à un enfant de 3 ans, qu’à son grand frère ou sa grande sœur de 7 ans. Pas plus d’ailleurs qu’à vous ! Lorsque l’on joue avec un enfant de 3 ou 4 ans, le plaisir vient pour nous du temps de partage, pas des qualités ludiques du jeu proposé.
On l’a vu, à partir de 18 mois les enfants sont beaucoup occupés à faire des jeux d’imitation. Il faut donc que le choix de votre premier jeu se porte sur un titre qui propose un matériel assez figuratif et facilement préhensible. De même, si votre jeu raconte une petite histoire qui aidera l’enfant à se plonger dans la partie, cela ne peut être que positif ! Si on prend l’exemple de Mon premier Verger, on retrouve à la fois un grand panier et de gros fruits en bois très attirants et la petite histoire du corbeau qui progresse sur le chemin pour venir manger les fruits avant qu’on ne les cueille. C’est léger, mais cela suffit pour expliquer pourquoi on fait telle ou telle action et immerger l’enfant dans la partie.
Enfin, il reste la question des jeux coopératifs. Ils véhiculent des valeurs de partage, d’entraide, de communication… Bref tout ce que l’on souhaite inculquer à nos chères têtes blondes. Ils permettent de relativiser la défaite et de rendre la partie plus sereine pour les parents en évitant les pleurs (le plus souvent, car les enfants sont plein d’empathie et veulent parfois que ce satané corbeau gagne aussi). Ce sont de très bons choix pour commencer. En revanche, il faut être vigilant à ne pas proposer que cette forme de jeu. Se confronter à la défaite dans le jeu fait partie de l’apprentissage de la frustration et permet à l’enfant de comprendre que le jeu est une parenthèse à part, qui n’a pas de conséquence durable sur la vraie vie. Il devient alors un bon moyen d’apprendre à gérer ses émotions négatives et à relativiser. Plutôt pas mal pour éviter qu’ils deviennent de mauvais perdants en grandissant, non ?
Pour résumer :
- Ne commencez pas trop tôt ! 2 ans et demi voire 3 ans (dans l’idéal) c’est très bien.
- Faites des essais, si l’enfant n’est pas prêt, proposez lui une nouvelle partie quelques semaines plus tard.
- Choisissez des éditeurs reconnus pour leur savoir faire (Haba, Djeco) et n’ayez pas peur (même si l’enfant a 3 ans) que les jeux estampillés 2+ soient trop « bébé »
- Soyez vigilant à ce que le matériel soit figuratif et que le jeu raconte une histoire
- Le jeu coopératif est très bien pour débuter, mais il ne faut pas faire que cela !
- Veillez à ce que les parties n’excèdent pas 5 à 10 minutes dans vos premiers choix
- Soyez patients et allez-y en douceur. Dès 5 ans les jeux deviennent un peu plus créatifs et variés ; dès l’entrée en CP il y a un cap de franchi ; et dès 8 ans vous pourrez vous éclater !